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Nous sommes le 24 décembre, il est 18 heures. Le train arrive bientôt. Cela fait plus d’une heure qu’elle est en route. Son voyage intérieur a quant à lui duré bien plus longtemps. Le cauchemar a débuté il y a plus de 20 ans. Mia était âgée de 14 ans lorsque son beau-père a abusé d’elle. Cette nuit-là, son monde s’est effondré.
Un long combat
Cela a été le début d’un long combat contre la honte, le sentiment de culpabilité infondé et les blocages intérieurs. Elle a cherché du réconfort auprès d’hommes prétendus forts, ce qui a mené à de nouvelles déceptions. Elle a recouru à l’alcool et aux médicaments pour calmer sa douleur. À un moment donné, elle s’est rendu compte qu’elle se trouvait dans une spirale infernale. Pourtant, Mia n’a pas abandonné. Elle a continué à se battre, même s’il lui a fallu des années pour parvenir à avoir une vie sentimentale plus ou moins stable.
Depuis, son beau-père est décédé. Il ne faisait déjà plus partie de sa vie avant. Ce qui reste, c’est une relation brisée avec sa mère. Ce n’est en fait plus une relation du tout. Mia s’est sentie abandonnée par sa mère dans une phase déterminante de sa vie. Elle ne lui a jamais pardonné cela. Le dernier contact qu’elle a eu avec elle date de plus de dix ans.
Une démarche extraordinaire
Aujourd’hui, c’est Noël. Un réveillon de Noël comme beaucoup d’autres avant. Pourtant, aujourd’hui, Mia fait un pas exception-nel. Elle va à la rencontre de sa mère. C’est pourquoi elle est en route. Cela peut sembler un voyage en train tout à fait normal. Pour Mia, c’est pourtant une entreprise risquée. À côté d’elle, il y a un bouquet de fleurs avec une enveloppe qui lui est ratta-chée. Sa mère n’est au courant de rien. Va-t-elle d’ailleurs lui ouvrir la porte ? « Peut-être devrais-je m’annoncer comme fleu-riste à l’interphone ? » Elle élabore un plan malicieux, animée par l’amour qu’elle voue à sa mère. Amour ? Mia s’étonne d’elle-même et repense au passé.
Un nouveau départ
Il y a quelques mois, quelque chose de nouveau a commencé dans la vie de Mia. C’était pendant les vacances d’été. Pendant une randonnée, une bonne copine lui a parlé de l’impact positif du pardon. Mia se rappelle sa première réaction : « Pardonner ? Eh, Thérèse, c’est bien beau. Mais il y a des choses que l’on ne peut pas pardonner ! » Thérèse ne s’est pas laissé troubler. « Oui, moi aussi, j’ai toujours dit cela. Mais depuis que je lis la Bible avec un groupe, je crois toujours davantage que le pardon est une clé pour parvenir à une liberté et une paix intérieures. Un cadeau de Dieu. Et pour ce cadeau, Jésus a payé de sa mort sur la croix il y a 2000 ans. Il est ainsi devenu la source du pardon divin. Nous pouvons accueillir ce pardon en nous et le trans-mettre à nos semblables par notre cœur. Nous devenons ainsi une partie d’un courant de vie divin. Nous recevons le pardon et le transmettons. J’en suis aujourd’hui convaincue : même des expériences traumatisantes peuvent être surmontées, si nous lâchons prise intérieurement et que nous remettons ces expériences douloureuses à Dieu. »
Mia avait beaucoup d’objections et de questions. Après d’autres discussions, elle est devenue elle-même membre de ce groupe biblique. Il y a quelques semaines, ils ont parlé de Noël. La conclusion de cette soirée était la suivante : « À Noël, Dieu s’est fait homme, afin d’aller chercher les personnes là où elles sont. » C’est aussi ce qu’a vécu Mia. Jésus est venu la chercher dans son amertume et sa vulnérabilité. Elle a reçu le pardon et a voulu le transmettre plus loin. Ça a été une décision et le début d’un processus intérieur. Elle a régulièrement crié ses accusations et ses idées de vengeance à Dieu et s’en est déchargée auprès de lui. Au cours de nombreux combats intérieurs, elle a régulièrement pardonné à nouveau. En fin de compte, elle a réussi à lâcher prise complètement, pour remettre sa vengeance et son jugement à Dieu. Le courant du pardon habite désormais le cœur de Mia. Aujourd’hui, à l’occasion du réveillon de Noël, elle veut rendre ce courant visible en faisant une visite surprise et un cadeau surprise à sa mère.
Une entreprise risquée
C’est le moment de vérité. Mia se tient devant la porte de l’immeuble. Elle hésite. N’a-t-elle pas placé la barre trop haut pour sa mère et pour elle-même ? Elle prend son courage à deux mains et actionne la sonnette. Quelques secondes s’écoulent : « Oui, qui est là ? » Mia déforme sa voix : « Des fleurs pour vous ! » « Comment ? » Quelques secondes s’écoulent à nouveau. « Pour moi ? Euh, entrez seulement. Montez au troisième étage. » La porte se déverrouille en émettant un bourdonnement. Mia emprunte l’ascenseur jusqu’au troisième étage et ouvre la porte. « Mia ? » Sa mère reste plantée là. « Joyeux Noël, Maman ! » Mia lui tend le bouquet de fleurs et les deux femmes s’embrassent.
Sa mère invite Mia à entrer dans l’appartement. « Je n’ai pas d’arbre de Noël. Je ne savais pas non plus ce que j’aurais dû célébrer. » Elle mène Mia dans le salon. « Mia, c’est tellement merveilleux que tu sois là ! » Elle ouvre l’enveloppe et lit la lettre. Mia est curieuse. Comment sa mère va-t-elle réagir à sa lettre ? « Mia, tu t’excuses parce que tu t’es éloignée de moi ? Oh, je regrette tellement tout ce qui s’est passé ! Mais, ne me fais-tu vraiment plus de reproches ? » Mia s’éclaircit la voix : « Maman, j’ai pardonné. Je suis reconnaissante et heureuse que l’on m’ait aussi tout pardonné. » Elle se tait un instant. « Au-jourd’hui, c’est Noël. Dieu s’est fait homme, afin d’aller chercher les personnes là où elles sont. Dieu est venu me chercher dans ma plus profonde amertume et, par le pardon, m’a conduite vers une nouvelle liberté. »
« Oh, mon Dieu ! » La mère agite ses bras et regarde autour d’elle. « Je ne t’ai encore rien proposé ! Et ça à Noël ! Que dirais-tu de cuisiner ensemble ? Mia rigole et accepte volontiers. Elles se rendent toutes deux dans la cuisine et explorent le frigidaire et l’armoire à provisions. Pour un repas de Noël, cela ne suffira pas. Mais peu importe. Mère et fille sont d’accord : « Noël, c’est avant tout une affaire de cœur. » Elles cuisinent tout en bavardant. Il en résulte un repas original qui régale les deux.
Le courage de se lancer
Quelques heures plus tard, Mia rentre chez elle. Sa mère n’a certainement pas entièrement compris ce que Mia lui a raconté du « courant de pardon ». Cependant, Mia est convaincue que sa mère a davantage compris avec son cœur qu’elle n’a pu l’exprimer avec des paroles. Ce réveillon de Noël a changé sa relation. Mia réfléchit : « C’est ainsi que cela devait se passer. Le message de Noël entend transformer notre vie. » Et, de nouveau, elle se rappelle la conclusion de sa discussion au sein du groupe biblique : « À Noël, Dieu s’est fait homme, afin d’aller chercher les personnes là où elles sont. »
De retour chez elle, Mia ne ressent en rien la fatigue. Son cœur est comblé. Elle est assise à la table de la cuisine, boit un thé et hoche la tête. « C’est vraiment fou ! », se dit-elle à elle-même. « Simplement monter dans le train pour rendre visite à ma mère, avec laquelle je ne voulais plus avoir affaire pendant plus de dix ans. » Elle sourit. « Le risque a été payant. » Mia en est convaincue : « Il y a des choses que l’on devrait simplement faire, sans longuement réfléchir avant. Demander pardon et expri-mer son pardon en font partie. On peut lire des livres à ce sujet et en discuter. Mais on ne peut le vivre que si on le fait ! »
Markus Brunner, auteur de « Neues aus Bethlehem », Éditions Fontis
« Il y a des choses que l’on devrait simplement faire, sans longuement réfléchir avant. Demander pardon et exprimer son pardon en font partie. »
Irene Gerber
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